
Pour les autorités espagnoles, ce n'est plus une simple hypothèse : l'ETA a bien entrepris d'installer des bases logistiques au Portugal, un pays jugé plus sûr que la France, où l'organisation séparatiste armée basque est traquée de plus en plus efficacement par la coopération policière franco-espagnole. La découverte, le 5 février dans une maison de Casal da Avarela, près d'Obidos, à 85 kilomètres au nord de Lisbonne, d'une énorme quantité d'explosifs et de matériels destinés à la fabrication de bombes semble confirmer le transfert d'une partie de son appareil logistique.
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Le 9 janvier déjà, deux etarras présumés avaient été arrêtés au Portugal. L'un venait d'échapper à un contrôle de routine de la Guardia civil sur le territoire espagnol ; la camionnette qu'il conduisait, immatriculée en France, contenait des explosifs, des armes et des munitions. L'autre, une jeune femme figurant sur la liste des etarras les plus recherchés transportait dans sa voiture une forte somme d'argent, un lot de faux papiers et du matériel informatique.
Cet ensemble d'éléments avait déjà été interprété à Madrid comme "une tentative de l'ETA d'installer une infrastructure" en terre lusitanienne. Les policiers espagnols soupçonnent ce projet de "délocalisation" depuis la découverte, en octobre 2007, d'une voiture immatriculée au Portugal chargée d'explosifs. Quelques mois plus tard, un repenti avait indiqué au juge Baltasar Garzon que le chef de l'ETA de l'époque, Txeroki, avait ordonné la création d'une infrastructure au Portugal. Pour El Pais du 10 février, "le déménagement avec armes et bagages de l'ETA prouve son déclin, mais aussi sa volonté de poursuivre sa politique des bombes".
A Casal da Avarela, ce n'est pas seulement une cache, mais un véritable laboratoire de fabrication d'engins explosifs qui a été mis au jour. Selon les premières informations du ministère de l'intérieur espagnol, les enquêteurs auraient saisi 1,5 tonne de matériel, dont 1 330 kg de nitrate d'ammonium répartis en 12 bidons et quatre sacs, 75 kg de nitrate de potassium, 40 litres d'acide sulfurique... La précision de ces informations et la rapidité avec laquelle elles ont été diffusées par Madrid ont causé un certain malaise au Portugal.
Après un long mutisme, les autorités portugaises ont ramené à 800 kg, dont 500 kg de nitrate d'ammonium, la totalité de la prise. Pour plusieurs journaux, les révélations prématurées sur l'identité des deux etarras présumés qui occupaient la maison auraient facilité leur fuite. La presse souligne "un manque de coordination" entre les deux pays.
Découverte fortuite
"Des opérationnels de la gendarmerie portugaise ont détecté la présence d'éléments du CNI (les services de renseignement espagnols) sur le territoire portugais, mais le SIS (les services portugais) n'en a jamais été informé et n'a même pas été contacté." Cette révélation du quotidien Diario de Noticias, le 8 février, a été démentie par le CNI, puis par son homologue lusitanien dont le communiqué exalte, au contraire, "une coopération institutionnelle et opérationnelle loyale, étroite et fructueuse".
En fait, c'est tout à fait fortuitement que la gendarmerie portugaise est tombée sur la base de l'organisation basque. Deux jours plus tôt, des gendarmes avaient trouvé dans les environs une fourgonnette contenant des explosifs, mais ils n'ont pas fait le lien avec ETA. "En France, cela aurait été la première hypothèse", relève la presse espagnole. Se croyant repérés, les deux etarras ont fui précipitamment, laissant la porte de leur pavillon entrouverte, ce qui a fini par alerter le voisinage.
"La vérité, insiste le Jornal de Noticias, est que les renseignements espagnols, la Guardia civil et la police nationale espagnole, n'ont jamais fourni la moindre information solide sur la présence de l'ETA au Portugal." Annoncée fin 2007, la création d'équipes hispano-portugaises de magistrats et de policiers pour lutter contre l'ETA ne serait jamais allée "au-delà du papier".
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