dimanche 14 mars 2010

Sous le feu des critiques, les fonds spéculatifs n'ont pas profité de la crise grecque


La crise grecque se soldera-t-elle par une double peine pour les spéculateurs "sans scrupule" ? Ostracisés par l'opinion publique et les autorités, ils n'auraient pourtant pas bénéficié financièrement des déboires de la Grèce. Les maîtres en la matière, les fonds spéculatifs comme celui de George Soros - connu pour avoir empoché un milliard de dollars en misant sur l'effondrement de la livre sterling en 1992 - ont été pointés du doigt par les régulateurs.

Sous le feu d'une enquête de la Security and Exchange Commission (SEC), le gendarme des marchés américains, ils sont soupçonnés d'avoir comploté lors de dîners pour faire plonger l'euro en misant sur un défaut de la Grèce. Mais l'aspect cocasse, de cette affaire, c'est que ces fonds "macros", ainsi dénommés car ils parient sur une grande tendance économico-géopolitique, n'ont pas gagné d'argent sur le dos de la Grèce. Bien au contraire.

"NI VOYOUS NI IDIOTS"

Selon les données du Hedge Funds Research (HFRI), les rendements de cette famille d'investisseurs ont reculé de 1 % sur les mois de janvier et février. Petite précision, pour un hedge funds une baisse des performances de 1 % peut représenter beaucoup d'argent. Quelque 44 milliards de dollars (32 milliards d'euros) au total sur cette catégorie de fonds, selon le HFRI.

Certains, comme l'européen Brevan Howard AM, le géant Moore Capital management ou Tudor Investment corp., réputés pour leur flair financier, auraient enregistré les pertes les plus élevées (de 2 % à 3 %). Autrement dit, des millions de dollars potentiellement partis en fumée. Pourquoi ? Comment ? Car l'euro a pourtant bel et bien chuté de 4,8 % au cours des deux premiers mois de l'année et le coût de la dette grecque s'est bel et bien envolé.

"Les fonds spéculatifs ne sont pas des voyous qui s'attaquent à des vieilles dames sans défense. Ce sont de grosses machines professionnelles, explique un gérant de hedge funds. Ils investissent à plusieurs endroits à la fois. Sur le marché des changes, les gains empochés sur une devise, comme l'euro, peuvent être compensés par des pertes sur le yen."

En outre, les annonces politiques ambiguës sur un éventuel sauvetage de la Grèce se sont traduites par une forte volatilité sur le marché des changes. "C'était très choppy (volatil) ", se désole une gérante. Or, cette famille de fonds n'aime pas ça. Ces spéculateurs ont besoin qu'une tendance forte se dessine pour gagner.

A rebours des idées reçues, Cyril Julliard, gérant du fonds Eraam, a une autre explication : en fait, ces spéculateurs n'ont sans doute pas du tout parié sur un défaut de la Grèce. "Les hedge funds ne sont pas idiots. Tout le monde sait que la Grèce ne fera pas faillite", estime-t-il.

Contre toute attente, ils auraient donc acheté et non pas vendu des titres de dette au début de l'année. Ils auraient aussi misé sur une baisse - et non une hausse - du prix des CDS grecs, ces contrats destinés à protéger un émetteur contre le défaut d'un pays. Et s'ils ont perdu de l'argent en janvier et février, ils pourraient donc en gagner beaucoup au cours des prochaines semaines.

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