jeudi 11 mars 2010

La Lituanie stabilise ses relations avec la Russie, vingt ans après son indépendance


La Lituanie célèbre, le 11 mars, le 20e anniversaire de la restauration de son indépendance. Le plus méridional des Etats baltes fut à l'époque la première république soviétique à se libérer formellement du joug de l'URSS et l'anniversaire est célébré en grande pompe au Parlement comme dans les rues enneigées, avec défilé militaire et déclarations solennelles.

Mais cette célébration de l'indépendance, qui rappelle des souvenirs douloureux à cause des déportations en Sibérie et de la chape de plomb communiste, masque une réalité plus prosaïque : jamais, depuis la fermeture de la centrale nucléaire d'Ignalina, le 31 décembre 2009, la Lituanie n'a été plus dépendante de la Russie pour son approvisionnement en énergie, ce qui est source d'inquiétude pour une partie des responsables politiques lituaniens. "J'espère que lorsque nous célébrerons les trente ans de notre indépendance, nous aurons une indépendance totale, confie au Monde Andrius Kubilius, le premier ministre conservateur lituanien. Même si notre indépendance n'est pas totale, nous sommes en tout cas membres de l'OTAN et de l'Union européenne."

La fermeture de la centrale d'Ignalina, construite à l'époque soviétique et du même modèle que celle de Tchernobyl, était la condition imposée par Bruxelles pour que la Lituanie puisse adhérer à l'Union en 2004. Jusqu'au Nouvel An, la Lituanie était, après la France, le deuxième pays au monde le plus dépendant du nucléaire pour sa production d'électricité. Ces dernières années, de nombreux partis ont brandi la menace russe pour plaider en faveur d'un prolongement de la durée d'exploitation de la centrale.

Avant d'être élu à l'automne 2008, Andrius Kubilius avait lui-même affirmé qu'à la fermeture d'Ignalina "il faudra payer notre électricité deux fois plus cher mais, en plus, il n'est pas dit que la Russie soit capable de nous fournir les quantités nécessaires en cas d'hiver très froid." Deux mois après la fermeture et un hiver très froid, rien de tel ne s'est passé. Les prix ont certes augmenté mais les relations avec la Russie semblent au contraire en train de se stabiliser, ce qui est en grande partie le fait de la nouvelle présidente de la République, Dalia Grybauskaite.

A la mi-février, le président russe Dmitri Medvedev avait décliné l'invitation lituanienne de venir assister aux célébrations du 11 mars "pour raison de calendrier". Mais la présidente lituanienne était satisfaite quand même. "L'objectif de l'invitation à la Russie était de voir son attitude vis-à-vis de l'indépendance de la Lituanie, explique Mme Grybauskaite au Monde. Et je dois dire que je suis très satisfaite, car nous avons reçu une lettre du président Medvedev nous félicitant pour l'anniversaire de notre indépendance. C'est un pas très important pour nous, car c'est la première fois que nous recevons de la Russie une telle lettre pour notre indépendance."

La présidente lituanienne a la dent bien plus dure pour fustiger les politiques lituaniens qui ont tenté de retarder la fermeture de la centrale. "Des lobbies ont été très actifs, il y a eu une monopolisation du secteur de l'énergie (autour du nucléaire) et les alternatives pour le développement de nouvelles sources ont été bloquées, dit la présidente. Notre secteur de l'énergie a stagné pendant vingt ans. Je considère que la fermeture d'Ignalina a été un choc positif. Et j'espère que nous serons capables de réaliser rapidement notre réelle indépendance."

En attendant une nouvelle centrale nucléaire, le développement d'énergies renouvelables et le raccordement au réseau électrique ouest-européen, la présidente a adopté une approche pragmatique vis-à-vis de la Russie. Qui le lui rend pour l'instant. Alors que la Lituanie doit désormais importer la moitié de son électricité et augmenter ses achats de gaz naturel russe pour sa consommation, Vladimir Poutine, que la présidente lituanienne a rencontré en Finlande en février en marge d'un sommet sur la mer Baltique, s'est dit prêt à répondre à une demande lituanienne en gaz russe.

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